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Patrimoine souterrain creusé
  Il existe à travers le monde un patrimoine peu connu, mystérieux, envoûtant. Souvent spectaculaire, il reste cependant le parent pauvre du patrimoine construit en surface. Il s'agit du patrimoine souterrain creusé.
 
  C’est un patrimoine universel présent dans l’habitat, dans l’architecture urbaine, rurale, militaire et sacré, ainsi que dans des lieux d’activité économique ;


  Un patrimoine toujours vivant dans certaines régions du monde ;

  Des sites exceptionnels inscrits sur la liste du Patrimoine Mondial de l’UNESCO ;

  De nombreux sites menacés de disparition, notamment en Europe ;

  Un patrimoine parfaitement intégré dans l’environnement qui peut, à ce titre, être une référence pour l’avenir.

Au mois d'octobre 1993, s'est déroulé à Saumur, en France, un symposium international placé sous le haut patronage de l'UNESCO et consacré à la connaissance, conservation et exploitation touristique du Patrimoine Souterrain Creusé. Cette manifestation organisée par HADES (ancien CEPPSC), co-organisée par la SUB- ARTESIA, soutenue par les autorités locales, régionales et par l'Agence Française d'Ingénierie Touristique a accueilli plus de 100 congressistes de huit nationalités. il s'agissait aussi bien de spécialistes de renommée internationale dans le domaine de l'archéologie et de la géologie que de représentants d'associations travaillant sur le sous-sol, ainsi que des exploitants de sites touristiques souterrains .

La présence de Monsieur BOULENZI, représentant de l'UNESCO soulignait l'importance d'une approche internationale pour la valorisation d'un élément non négligeable mais encore sous estimé du patrimoine culturel mondial.

Ce patrimoine appelé aussi troglodytique, s'inscrit désormais parfaitement dans la politique de la Convention du Patrimoine Mondial de l'UNESCO, laquelle prend en compte et d'une manière indissociable la dimension culturelle et naturelle des sites. Le troglodytisme représente à cet égard une parfaite intégration de l'homme et de son habitat mais aussi souvent de son espace cultuel, funéraire, industriel et défensif dans l'environnement.

Le troglodytisme, le plus souvent oublié, a accompagné la naissance et l'évolution de l'humanité. Les premières habitations et surtout les premières agglomérations qui apparaissent au Moyen-Orient, que ce soit à Beida, Mallaha, Aïn Ghazal ou à Jericho, sont à moitié creusées ou enterrées. Quant au plus vieux site vraiment troglodytique, il se trouve à Beersheva dans le Neguev (Israël).

Ici, au quatrième millénaire furent creusées dans les limons de la terrasse du Wadi Sheva des chambres circulaires et des galeries se développant à certains niveaux jusqu'à 7 mètres sous le sol actuel de la terrasse fluviatile (J.Perrot 1984). Il s'agit certainement du plus vieux complexe troglodytique du monde. La Chine présente aussi un certain nombre des sites troglodytiques remontant au Néolithique.

Le troglodytisme représente la facilité d'élaboration d'un habitat, facilité remarquée déjà aux temps les plus reculés, et notamment dans les régions désertiques, où l'absence du bois en tant que matériaux de construction est une donnée constante.

L'autre avantage du troglodytisme réside dans son confort thermique. La température dans une telle habitation est plus ou moins constante et égale à la moyenne thermique de la région (douce l'hiver et fraîche l'été). Cela s'explique par l'inertie thermique de la roche. Dans ces conditions on peut parfaitement parler d'un habitat solaire passif.

Ces quelques remarques montrent que l'habitat souterrain ne constitue pas une forme régressive d'architecture, mais une façon plus économique d'habiter dans un cadre plus facile à exécuter.

Le nombre important de sites troglodytiques, que ce soit dans le bassin méditerranéen, en Chine, et d'une manière générale dans les régions arides, témoigne des qualités et de l'universalité de ce type d'habitat.

L'autre avantage du troglodytisme se retrouve dans sa discrétion qui lui donne parfois la fonction de refuge.

Effectivement le sous-sol abrite de nombreux souterrains-refuges, de toutes les époques et parfois même de véritables ensembles défensifs comme en Cappadoce en Turquie. Ici, à côté du site de Goreme, classé sur la liste du patrimoine mondial de l'UNESCO pour la qualité de ses églises rupestres, se trouvent de nombreuses villes souterraines, comme celle de Kaymakli ou celle de Derinkuyu, qui pouvait abriter à l'époque Byzantine plusieurs milliers de personnes et cela sur plusieurs niveaux, allant parfois jusqu'à 75 mètres de profondeur.

Dans le sud- Tunisien, dans la chaîne du Ksour, les populations Berbères, tout comme les Byzantins en Cappadoce, fuyant l'emprise de l'islam, ont trouvé refuge dans le roc. Ils sont devenus troglodytes et continuent à vivre ainsi aujourd'hui.

L'habitat n'est pas la seule manifestation du troglodytisme. L'invulnérabilité apparente de l'architecture rupestre, associée à la notion de la matrice maternelle représentée par la terre, fait de celle-ci le meilleur abri pour le sacré et l'éternel.

De nombreux temples et tombeaux à travers le monde illustrent cela, que ce soit à Pétra, en Jordanie, à Ajanta en Inde, à Bamyian en Afghanistan, ou à Lalibella, en Ethiopie. Certains sites sont inscrits sur la liste du Patrimoine Mondial de l'UNESCO et font l'objet d'une protection rapprochée pouvant servir d'exemplarité de la démarche comme c'est le cas actuellement à Pétra en Jordanie où jadis à Abu-Simbel en Egypte.

D'autres sites émergent lentement de l'oubli, comme la ville troglodytique de Matera, dans le sud de l'Italie, classée récemment sur la liste du patrimoine mondial de l'UNESCO. ou bien, le site troglodytique urbain de Paterna en Espagne, sauvé par la volonté municipale.

Cette architecture soustractive s'inscrit dans la partie superficielle de l'écorce terrestre, à l'interface géosphère/atmosphère/biosphère. Ici, les paysages sont en perpétuelle évolution par le biais de l'érosion. Elle modèle des paysages grandioses comme ceux de la Cappadoce ou de Pétra, mais en s'attaquant à la roche, elle détruit progressivement les détails architecturaux des édifices troglodytiques, avant de le faire disparaître totalement.

Aujourd'hui, des scientifiques de nombreux pays travaillent en laboratoire à l'image des biologistes et des médecins afin de trouver des solutions et de ralentir cette évolution naturelle que nous appelons érosion ou les "maladies de la pierre". La conservation de l'architecture rupestre pose de sérieux problèmes.

Marco Polo signalait « Autour de Scassem... les vilains... font de très belles et spacieuses habitations sous terre. Ils font de vastes caves, et le peuvent fort aisément parce que les monts ne sont point de roc, mais presque tout de terre ». Aujourd'hui, plus de 30 millions de Chinois vivent encore dans les maisons creusées le plus souvent dans les loess. En Europe, il est possible encore de rencontrer quelques troglodytes et en particulier en Anjou, dans le Saumurois, mais pour combien de temps encore?

Autrefois, ici, de nombreuses personnes vivaient dans des logis creusés dans la roche, dans des maisons sans toiture ni charpente ni papiers peints. Au Moyen-Age dans un village du bord de la Loire du nom de Turquant, il y avait seulement trois maisons construites pour mille habitants. Dans l'Artois et en Picardie qui connaît les villages souterrains médiévaux, appelées communément souterrains- refuges? Aujourd'hui, là comme ailleurs, des centaines de kilomètres de galeries d'anciennes carrières, de souterrains-refuges, d'églises, de châteaux et de fermes, le plus souvent abandonnées, témoignent d'un patrimoine unique, peu connu et en voie de disparition.

J. REWERSKI Président d’HADES

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